petite rectification

Je crois qu’il est nécessaire de compléter cet article (que vous avez du lire, je n’en doute pas, avec un certain désappointement ; constatant toutes les inepties  qui, de nos jours, défigurent notre précieuse réalité). Le 4 octobre, nous avions donc l’honneur de pénétrer le fameux bâtiment aux briques rouges qu’Eymeric vénère depuis notre arrivée en suède.

(Je le trouvais personnellement austère jusqu’à ce fameux buffet...)

Cette fois ci, je me l’étais promis, je me fondrais au paysage, je quitterais le confort de mes chaussures de marche (pour mes fausses converses...les seules autres chaussures que je possède ici) et je ferais mon possible pour adopter un comportement adéquat... On nous avait prévenus ; jeans et baskets seraient refusés.  Eymeric s’était donc particulièrement appliqué dans sa tenue ; il ne voulait pas se voir refuser l’entrée et toute la nourriture qu’elle abritait ! ... J’étais agréablement surprise en découvrant l’intérieur du City Hall ; de grandes arcades enveloppaient la salle principale et les briques rouges devenaient presque chaleureuses. C’était grandiose, il régnait une ambiance très bourgeoise, tout était chic...

J’observais donc les lieux en me faisant ces réflexions pendant qu’Eymeric observait les coupes des gens et enchainait les verres de Coca en espérant enfin tomber sur du vin. Et c’était comme s’il l’avait ressenti, cet effet de l’alcool qu’il convoitait (je tiens à préciser ici, que c’était bien le gout et non l’effet du vin qu’il convoitait... évidemment). Son impatience presque agressive à se gonfler enfin des aliments qui attendaient sur les tables nous le rendait incontrôlable. Il était aux aguets, prêt à courir à tout moment comme s’il s’agissait de chasser des toasts en fuite (taisons toute référence au cri animal d’un yodp singulier, ce n’est pas le sujet, et la vengeance serait démesurée).

Heureusement, le discours d’accueil fut très bref (en comparaison aux discours qu’on a coutume d’entendre en France). Dès qu’il s’acheva, dès que l’accès au buffet fut autorisé, Eymeric disparut.

Je crois que c’était trop pour lui, toute cette abondance, après des semaines de demi-jeûne. Il ne s’arrêtait plus de bondir d’une table à une autre, et puis encore une autre, en s’immisçant dans les files avec une habileté et une ténacité que je ne lui avais jamais connu. Je tentais de lui rappeler toutes ces bonnes résolutions qu’on s’était juré de tenir pour ne plus jamais être assimilés à deux péquenauds perdus dans le monde urbain. Malheureusement l’élégance du calme ne lui apporterait aucune saveur comparée à un peu plus de saumon, toujours plus de saumon... Je m’accrochais à mon rôle. Après m’être concocté une assiette copieuse intégrant la plupart des plats végétariens qui étaient proposés, je pensais monter à l’étage pour découvrir cette fameuse « salle dorée »... Mais Eymeric était intraitable ;  il fallait attendre, attendre que les buffets du rez des chaussé ne proposent plus rien. Je n’osais plus m’élever contre ses volontés...

Une fois le ventre grossi, une fois les mains remplies, Eymeric reprenait son visage le plus doux, et les lieux devenus visibles lui dévoilaient enfin tout leur charme... La journée s’achevait calmement, et tout le monde semblait ravi.

Je préfère ne pas vous dire ce qu’il cachait derrière sa main ; au fond de sa poche.

Julia